L’assassinat, en octobre 2018, du journaliste saoudien, Jamal Khashoggi, au consulat d’Arabie saoudite à Istanbul, a provoqué une onde de choc dans l’opinion publique et, en particulier, parmi les défenseurs des droits humains, dont je suis.
C’est alors qu’en ma qualité de vice-présidente de la Commission des Affaires étrangères, j’ai adressé un courrier à l’ambassadeur d’Arabie saoudite en France, M. Al Ankary, cosigné par plusieurs de mes collègues membres de la Commission. Ce courrier faisait part de notre extrême préoccupation et demandait des explications au gouvernement saoudien sur les circonstances de la disparition du journaliste tout en rappelant les principes du droit à la vie et du respect de toute personne quelle que soit sa profession ou ses opinions.
Ce courrier étant resté sans réponse, j’ai de nouveau interpellé l’ambassadeur lors de son audition devant la Commission des Affaires étrangères, le 22 janvier, pour lui reformuler notre inquiétude. Ce fut aussi l’occasion de l’alerter sur la très préoccupante situation des droits humains dans son pays, alors qu’un grand nombre de défenseurs des droits humains et de détracteurs du gouvernement sont détenus, dont certains condamnés à de longues peines d'emprisonnement à l'issue de procès inéquitables. J’ai en particulier évoqué le cas d'Esra al-Ghomgham, militante et menacée de décapitation. Dans sa réponse, M. Al Ankary a qualifié l’assassinat de Jamal Khashoggi de "crime qui va à l'encontre de toutes les valeurs auxquelles tient l'Arabie Saoudite", rappelant que l'enquête qui vise les "membres du commando" ayant perpétré ce meurtre est toujours en cours mais que "onze individus ont été transférés à la justice". A propos de la situation des défenseurs des droits humains, il a affirmé qu'il existe aujourd'hui "beaucoup de gens qui critiquent le gouvernement saoudien" qui n'ont "jamais été arrêtés". Pour justifier les arrestations, il a ajouté « qu’il y a [des] journalistes ou des écrivains ou [des personnes] travaillant dans le domaine associatif, qui sont en relation avec d'autres pays étrangers, qui sont parfois membres de groupes classés comme terroristes".
Lors d’un déjeuner, mi-février, auquel il m’a conviée, avec deux de mes collègues de la Commission, j’ai obtenu les mêmes réponses à mes questions. La défenseure des droits humains que je suis compte persévérer dans cette interpellation courtoise mais ferme.